Comme nous l’avions présenté dans un précédent article, la loi du 23 mars 2020 ayant instauré l’état d’urgence sanitaire est venue autoriser le gouvernement à prendre, par voie d’ordonnances, toute une série de mesures d’adaptation de la société à la situation de crise engendrée par la propagation du Covid-19. Parmi les nombreuses ordonnances qui ont été prises à la suite de cette annonce, l’une d’elle concernait la suspension de tous les processus électoraux en cours mais également ceux devant être engagés dans les entreprises. Selon l’Ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020, les projets d’organisation des élections professionnelles CSE devaient être suspendus à compter du 12 mars et ce jusqu’à une date fixée à 3 mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. La date de cessation de l’état d’urgence sanitaire était alors méconnue.
Initialement, l’état d’urgence sanitaire devait prendre fin le 24 mai 2020 mais le gouvernement a finalement décidé, le 11 mai dernier, de le prolonger jusqu’au 10 juillet 2020. Deux ordonnances sont alors venues préciser, mais surtout adapter, les conséquences de ce report d’échéance sur la reprise des processus électoraux dans les entreprises.
Les règles de suspension et de report initialement prévues
L’état d’urgence sanitaire devait initialement prendre fin le 24 mai 2020. Selon l’Ordonnance du 1er avril 2020 qui était venue fixer les contours de la suspension des élections professionnelles, les règles suivantes avaient été décidées :
- L’entreprise qui avait un projet d’élections professionnelles en cours à la date du 12 mars 2020 était tenue de le reprendre à partir du 24 août 2020, soit 3 mois après la cessation de l’état d’urgence sanitaire ;
- L’entreprise qui n’avait pas engagé l’organisation de ses élections au 12 mars mais qui comptait débuter ce processus durant la période d’état d’urgence sanitaire avait entre le 24 mai 2020 et le 24 août 2020 pour informer son personnel et les organisations syndicales représentatives de la mise en place ou du renouvellement de son comité social et économique (CSE).
Les apports de l’Ordonnance du 13 mai 2020
Le report de la fin de l’état d’urgence sanitaire laissait logiquement penser à un report des dates de reprise des processus électoraux précitées. Ainsi, les projets auraient dû reprendre le 10 octobre 2020 et être engagés entre le 10 juillet et le 10 octobre 2020. Mais, comme le soulignent les rédacteurs de l’Ordonnance susvisée, un tel décalage des élections professionnelles aurait sensiblement impacté la représentativité des syndicats sur le 3ème trimestre de l’année 2020. En effet, nombre de projets d’élections débutés si tardivement auraient vu leurs résultats proclamés en 2021 et leur audience syndicale n’aurait pas pu être comptabilisée au 31 décembre de l’année 2020. La représentativité syndicale en aurait donc été amoindrie.
Avec l’Ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020, le gouvernement décorrèle la prolongation de l’état d’urgence sanitaire avec celle de la suspension des élections professionnelles. Ainsi, le calendrier initial est conservé, à l’exception près que le gouvernement remplace, dans un souci de cohérence et de clarté, la date du 24 mai 2020 par celle du 31 mai 2020. Ainsi, les échéances suivantes s’appliquent aux entreprises :
- Si un projet d’élections professionnelles était en cours avant le 12 mars 2020, il doit reprendre à partir du 1er septembre 2020 ;
- Si un projet d’élections professionnelles devait être engagé entre le 12 mars 2020 et le 31 mai 2020, l’entreprise doit déclencher son organisation entre le 31 mai et le 31 août 2020.
Les apports de l’Ordonnance du 17 juin 2020
Pour les entreprises dont le projet d’élections professionnelles était en cours avant le 12 mars 2020, l’Ordonnance du 13 mai 2020 prévoyait une suspension du processus électoral jusqu’au 31 août 2020 inclus.
Désormais, par l’Ordonnance du 17 juin 2020, le législateur prévoit que les employeurs ont la faculté de programmer la reprise du processus électoral sur une date fixée librement entre le 3 juillet et le 31 août 2020. Pour cela, l’employeur doit informer, au moins 15 jours avant la date de reprise du processus :
- les organisations syndicales intéressées, autrement dit il s’agit de celles qui ont été invitées (ou qui doivent être invitées) à la négociation du protocole d’accord pré-électoral (PAP) ;
- les salariés de l’entreprise (par une note de service) ;
- la DIRECCTE si elle avait été saisie.
A défaut, en l’absence de reprise “anticipée” (donc entre le 3 juillet le 31 août 2020), le processus électoral doit reprendre à compter du mardi 1er septembre 2020.
Quid des élections partielles ?
Par principe, un employeur est dispensé d’organiser des élections partielles lorsque le mandat de ses représentants du personnel a expiré moins de 6 mois avant la date initialement prévue de renouvellement de l’instance. Si l’organisation d’une élection partielle était en cours au 12 mars 2020, elle doit reprendre à compter du 31 août 2020. Mais, si au 31 août 2020, la durée restant à courir avant la date de fin du mandat des membres du CSE est maintenant inférieure à 6 mois, l’employeur n’est plus tenu d’organiser les élections partielles. Il en est de même des entreprises qui comptaient organiser de telles élections pendant la période d’état d’urgence sanitaire et qui, entre le 31 mai et le 31 août 2020 (selon le calendrier qui leur est imposé par la loi), ne remplissent plus cette “condition des 6 mois”.
En d’autres termes, au 31 août 2020, seules les entreprises ayant un CSE dont le mandat des élus expire après le 28 février 2021 (soit 6 mois après la cessation de la suspension des élections professionnelles) resteront tenues de remplir leur obligation d’organiser des élections partielles.