CSE : les salariés assimilés au chef d’entreprise ne sont plus exclus de l’électorat !

Tout comprendre des élections partielles du CSE v2

De jurisprudence constante, la Cour de cassation inrprétait les dispositions de l’article L.2314-18 du Code du travail en privant certains salariés de la qualité d’électeur aux élections professionnelles lorsqu’ils jouissaient d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise et/ou lorsqu’ils représentaient effectivement l’employeur devant le Comité Social et Économique (autrement dit devant les Institutions Représentatives de l’Employeur – IRP).

En 2021, le Conseil Constitutionnel, via une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) n°2021-947, a déclaré que cette exclusion d’une partie des électeurs était inconstitutionnelle. Pour donner suite à cette décision, l’article L.2314-18 du Code du travail a été modifié de façon à les intégrer à l’électorat.

Les faits et la saisine du Conseil Constitutionnel

En 2019, la société Carrefour supermarché France a organisé la mise en place de son CSE. La CGT des personnels du commerce et de la distribution et des services a saisi le tribunal d’instance, en date du 9 décembre 2019, aux fins d’annulation des élections professionnelles pour le troisième collège du fait que les directeurs de magasin avaient été inscrits comme électeurs sur la liste électoral du collège correspondant.

Plusieurs mois plus tard, le syndicat national de l’encadrement du groupe Carrefour CFE-CGC a sollicité la transmission à la Cour de cassation d’une QPC.

Le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse a rendu un jugement le 17 juin 2021 ; jugement transmettant une QPC ainsi rédigée :
« La disposition de l’article L. 2314-18 du code du travail telle qu’interprétée par la jurisprudence de la Cour de cassation, en privant certains travailleurs de la qualité d’électeur aux élections professionnelles, et en n’encadrant pas mieux les conditions de cette exclusion et en ne les distinguant pas des conditions pour n’être pas éligibles, ne méconnaît-elle pas le principe de participation des travailleurs par l’intermédiaire de leurs délégués à la détermination des conditions de travail à la gestion des entreprises défini au point 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ? »

Le Conseil Constitutionnel, le 19 novembre 2021, est venu se prononcer sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L.2314-18 du code du travail.

La réécriture de l’article L.2314-18 du Code du travail par le législateur :

Afin de se mettre en conformité avec la décision du Conseil Constitutionnel, et suite à l’abrogation de l’article L.2314-18 du Code du travail, le législateur a légèrement modifié la rédaction de cet article. Désormais, celui-ci dispose que « Sont électeurs l’ensemble des salariés âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à leurs droits civiques. ».  

Outre la référence aux salariés des « deux sexes » qui a été supprimée par la même occasion, l’article vise désormais « l’ensemble des salariés » et non plus « les salariés » selon l’ancienne formulation. Même si cet article ne mentionne pas explicitement que les salariés assimilés par l’employeur sont désormais électeurs, c’est bien ici sous-entendu par le législateur. Désormais, ces salariés ne sont plus privés du droit de vote, et doivent avoir la possibilité de voter aux élections professionnelles. Attention, cet article vise bien ici les salariés, ce qui implique qu’ils soient liés par un contrat de travail.   

Il faut donc bien faire attention de ne pas exclure de l’électorat ces salariés assimilés à l’employeur par automatisme !  

Si la capacité de voter leur est ouverte, ils demeurent néanmoins toujours exclus de l’éligibilité. En effet, l’article suivant (L.2314-19 du Code du travail), consacré aux conditions d’éligibilité, a, lui en revanche, été significativement modifié pour exclure expressément de l’éligibilité les « salariés qui disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise ou qui le représentent effectivement devant le comité social et économique. » 

Jéremy
Author:
Jérémy a occupé les fonctions de Juriste en droit social au sein de notre pôle vote électronique à son arrivée en octobre 2019. Depuis l'été 2021, il est le Responsable Conseil & Développement de ce pôle.